Le cocktail à 500 millions d'euros
Le cocktail d’été à 500 millions d’euros
C’est la mauvaise surprise de l’été:
A la base, il y a incontestablement quelques irrégularités. Les agriculteurs français, comme tous les agriculteurs européens, restent très dépendants des subventions de la politique agricole commune (PAC) qui intervient dans trois domaines : soit pour soutenir des revenus (par les aides directes aux revenus), soit pour aider à gérer les marchés (par ce qu’on appelle les interventions en stockant les productions quand il y a des surplus par exemple), soit pour contribuer à la transformation du secteur et au développement rural (aides dites du « deuxième pilier »). Mais ces aides n’épuisent pas tout et chaque Etat conserve des moyens budgétaires pour compléter les subventions européennes ou pour soutenir des actions qui sont hors du champ communautaire (enseignement agricole). L’intervention nationale est cependant strictement encadrée et ne doit en aucun cas contrevenir au grand dogme communautaire : la libre concurrence dans un marché unique. Tout ce qui peut fausser la concurrence est strictement interdit.
Mais la ligne n’est pas toujours évidente notamment entre les aides structurelles cofinancées par l’UE par le deuxième pilier (type arrachage de vignes ou aides à l installation des jeunes agriculteurs) et les aides conjoncturelles d’aide à l’écoulement des productions nationales, qui elles sont strictement prohibées. Ainsi, l’Etat peut financer une campagne de promotion qui dirait « mangez des fruits » mais pas une promotion des « fruits de
Telle est la règle. Mais il arrive que la ligne soit franchie et que les Etats aident, sans trop le faire savoir, la commercialisation de produits nationaux. C’est ce qui s’est produit pendant dix ans, avec des aides à la commercialisation, à la transformation de fruits en conserve et surtout, à l’exportation dans les autres Etats membres de l’UE, distorsion caractérisée à la libre concurrence. Des aides attribuées aux organisations de producteurs français et non aux producteurs italiens et espagnols bien évidemment....
Une irrégularité parfaitement répréhensible mais sans doute assez courante... A hauteur sans doute de 388 millions d’euros auxquels il faut ajouter autour de 150 millions d’intérêts depuis les faits.
Deuxième élément du cocktail : une bonne dose d’hypocrisie. Car il faut reconnaître que cette méthode arrangeait beaucoup de monde. Le secteur des fruits et légumes est le plus difficile à gérer. Il fait chaud, la production monte. Il fait froid, la consommation chute. Quand il fait chaud au sud et froid au nord, c’est la catastrophe. Sans parler des coups de grêles qui peuvent anéantir une production en 10 minutes ! Par ces aides, l’Etat évitait de gérer des jacqueries paysannes liées aux surproductions. Les agriculteurs faisaient face aux concurrences des deux grands pays producteurs de fruits et légumes, l’Italie et l’Espagne avantagés par des coûts de production inférieurs et des monnaies chancelantes. L’accusation de l’Etat par certains syndicats agricoles est un peu déloyale car le système était connu de tous et arrangeait beaucoup de monde. On ne peut exclure que même l’UE n’ait pas voulu regarder de trop près puisque cet écoulement évitait les interventions c’est à dire le rachat des productions, suivies du spectacle navrant des décharges de tonnes de fruits.
Enfin, troisième élément, quelques maladresses viennent pimenter le tout. Tout d’abord, l’opinion a compris qu’elle risquait de payer pour embourser Bruxelles. C’est évidemment faux puisqu’il ne s’agit pas cette fois d’aides européennes irrégulières mais d’aides nationales attribuées aux producteurs français. Ensuite, le ministre a annoncé que les agriculteurs rembourseraient. Est-ce bien raisonnable ? Que va –t-il se passer ? Dans ces affaires, un double contentieux auprès de la cour de justice européenne est engagé : l’un à l’initiative de
Mais alors, à qui profite le crime ? L’affaire est très embarrassante à un autre titre. L’UE est à la veille de négociation budgétaire cruciale pour
Mots clés : aides nationales , fruits et légumes , surproduction
Source : non publié
Date : 07/08/2009
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A propos
Parce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.