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Le zonage des fonds structurels

Le zonage des fonds structurels



Le zonage est l’opération qui consiste à déterminer si un territoire est éligible ou non aux fonds structurels européens - le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER), le Fonds Social Européen (FSE) et le Fonds Européen d’Orientation et de Garantie Agricole (FEOGA). Les crédits, octroyés sous forme de subventions, sont répartis par objectifs, correspondant chacun à une situation économique donnée. La nouvelle réglementation applicable à partir de 2000 fixe trois objectifs dont deux sont régionalisés. L’objectif 1 correspond aux « régions en retard de développement ». L’objectif 2 correspond aux « zones en difficulté structurelle », qui recouvrent les zones en reconversion industrielle, les zones rurales en déclin, les zones urbaines en difficulté et les zones en crise dépendant de la pêche. Le nouvel objectif 2 se substitue aux objectifs 2 et 5b de l’ancienne réglementation de la période 1994-1999. Le troisième objectif concerne la politique de formation et n’est pas régionalisé ; les crédits correspondants s’appliquent alors aux Etats.

Quel est l’enjeu, sur quels critères se fonde le zonage et où en est la procédure ?.

L’enjeu financier

195 milliards d’euros seront consacrés aux politiques structurelles entre 2000 et 2006 dont plus des trois quarts suivent une logique territoriale. Tous fonds confondus, les régions françaises ont reçu près de 100 milliards de francs de fonds structurels sur la période 1994-1999 et devraient bénéficier d’un montant équivalent sur la période 2000-2006 (16,3 milliards d’euros). L’enjeu est non seulement d’être éligible mais de le rester car les conditions posées sont plus restrictives que dans l’ancienne réglementation, de telle sorte que les zones éligibles dans l’ancienne programmation ne le resteront pas forcément dans la nouvelle. En effet, un règlement du Conseil réaffirme et accentue la concentration des dépenses sur quelques régions et objectifs prioritaires. D’une part près de 70% de la dotation seront alloués à l’objectif 1 , d’autre part la population couverte par l’objectif 2 ne doit pas dépasser 18% de la population totale de la Communauté (contre 26% sur la période 1994-1999). Chaque Etat doit contribuer à l’effort de concentration. Les plafonds de population par Etat membre ont été fixés par la Commission. La population française couverte par le nouvel objectif 2 devra être réduite de 24,3%. Ainsi, sur les 24,77 millions d’habitants couverts par l’ancien zonage, près de 6 millions seront retirés des zones éligibles. Les 18,57 millions d’habitants restants se partageront 5,4 milliards d’euros (35,4 milliards de francs). Les zones retirées bénéficieront néanmoins d’un soutien transitoire de 612 millions d’euros (4,01 milliards de francs).

Les difficultés de sélection

Cette réduction impose une sélection plus rigoureuse entre régions et zones. Le critère de l’objectif 1 est un PIB par habitant inférieur à 75 % de la moyenne communautaire. Ce critère est désormais strictement appliqué . La liste a été établie par une décision de la Commission du 1° juillet dernier. En France, seuls les départements d’outre mer sont éligibles à l’objectif 1. Les critères de l’objectif 2 sont plus imprécis puisque rentrent en ligne de compte, le taux de chômage, le niveau de pauvreté, la densité de population, le pourcentage d’emplois industriel ou agricole par rapport à l’emploi total, le taux de délinquance... Certains critères sont appréciés au niveau départemental, d’autres au niveau infradépartemental. L’éligibilité peut aussi être admise pour les « zones contiguës » des zones sélectionnées dès lors qu’elles présentent une situation économique similaire. La réduction du plafond de population laisse également une marge d’appréciation supplémentaire puisque plusieurs zones peuvent répondent aux critères sans être pour autant retenues. Pour l’objectif 2, le découpage descend au niveau du canton, voire à l’échelon inférieur, au niveau du quartier urbain par exemple. Une fois les critères connus, commence alors un travail de couturière et d’équilibriste où les considérations locales et politiques comptent autant que les considérations techniques et économiques. La diminution de la population n’est pas uniforme au sein d’une région. Ainsi en Bretagne, selon une proposition du préfet, la population éligible des zones rurales diminuerait de 40%, tandis que celle de Lorient resterait stable et celle de Brest augmenterait de 37%.

C’est la Commission qui établit la liste des zones « en concertation étroite avec l’Etat membre concerné ». Le zonage est donc préparé par les Etats, en fait par les préfectures de région (les Secrétaires généraux aux affaires régionales - SGAR-), après consultation des élus intéressés réunis dans des commissions régionales d’aménagement du territoire. Les demandes sont centralisées à la DATAR, et, après les ultimes arbitrages, transmises à la Commission à Bruxelles. Les dossiers sont alors appuyés par les autorités locales intéressées avant décision finale. La Commission se contente d’avaliser les choix présentés, dès lors que les exigences techniques sont respectées. Les conditions de coopération entre les services de l’Etat et les régions sont très variables selon les régions. Lors de la précédente programmation, tous les préfets et les présidents de région avaient présenté, ensemble, leur dossier à Bruxelles, sauf dans un cas, où le préfet était venu seul.

Hélas, alors même que les circonstances sont plus difficiles, puisque le préfet doit annoncer des sorties de zones ou opérer des choix entre les zones urbaines, rurales ou industrielles, les conditions pratiques ont été particulièrement désastreuses cette année. Plusieurs personnalités déplorent que « les préfets aient engagé la concertation dans des conditions invraisemblables ». Qu’on en juge par les dates. Le nouveau règlement des fonds structurels a été adopté le 21 juin dernier, les limites de population par Etat membre ont été fixées le 1° juillet et les propositions des Etats étaient attendues pour le 31 août. Une échéance ridiculement courte dans une période fort peu propice, qui n’a été tenue que par trois Etats membres. En France, la préparation du zonage a fait l’objet d’une circulaire ministérielle du 9 septembre, fixant à l’unité près, le nombre d’habitants éligibles dans chaque région, chargeant les préfets d’organiser la concertation régionale et de présenter des propositions écrites pour le 3 octobre. Ainsi, compte tenu des délais d’organisation, la concertation locale pour ces 5,4 milliards d’euros a-t-elle été limitée à trois semaines. Cette échéance a été reporté in extrémis d’une semaine. Après les ultimes arbitrages, la proposition finalisée française est attendue pour fin octobre. La France sera alors le dernier pays à présenter ses propositions de zonage à la Commission. La liste définitive sera publiée en janvier 2000.


Mots clés : zonage, régions, fonds structurels, objectif 1, objectif 2, FEDER, SGAR, éligibilité
Source : Le Monde
Date : 26/10/1999

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A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.