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Le salaire des députés européens

Pas (encore ?) de salaire unique pour les députés européens

nota: un article portant sur le même sujet a été publié dans le Monde du 10 mai 2000. Le présent article constitue une nouvelle vesrion actualisée.

A travail égal, salaire égal. Soit. Mais à qui se comparer ? à son collègue, parlementaire national, ou à son voisin, député européen d’un autre Etat ? Jusqu’à présent c’est la première solution qui prévaut : les eurodéputés perçoivent les mêmes indemnités que les parlementaires nationaux du même pays. Cette situation est un héritage de ce qui existait lorsque les députés européens n’étaient que des délégués des parlements nationaux. Depuis 1979, ils sont élus au suffrage universel, mais le système de rémunération a été conservé. Dans presque tous les Etats, parlementaires nationaux et eurodéputés ont la même indemnité de base : en France, 6.735 euros par mois (brut). Il ne s’agit que de l’indemnité parlementaire de base, à l’exclusion des indemnités supplémentaires qui elles, sont fixées par le PE (voir annexe).

Ce qui veut dire aussi que les parlementaires européens ne gagnent pas tous pareil et qu’il existe même des différences importantes entre les pays. Des écarts qui augmenteront avec l’arrivée des députés issus des nouveaux Etats membres. Aujourd’hui, l’écart des salaires de base entre eurodéputés est de 1 à 4. En juin prochain, il va passer de 1 à 15. Une situation intenable auquel le Parlement européen a tenté de remédier en proposant un salaire unique.

Les difficultés commencent lorsqu’il s’agit de fixer le montant. Une solution simple aurait été de fixer le salaire à la moyenne des salaires. La moyenne actuelle, ou la moyenne après juin, encore plus basse ? La proposition n’enthousiasme guère les mieux dotés, qui préfèreraient un niveau fixe mais pas trop pénalisant pour eux. C’est la voie qui a été finalement retenue. En décembre 2003, le PE a donc proposé une réforme du statut d’eurodéputé accompagné d’une proposition d’indemnité unique, égale à la moitié du traitement de base d'un juge de la Cour de justice, soit de l'ordre de 8.500 euros mensuels.

La résolution du PE requérait cependant l'accord du Conseil pour entrer en vigueur. A plusieurs reprises, le Conseil a refusé, notamment sous la pression de la France et de l’Allemagne, et le PE en reste au statu quo.

Pourquoi ce refus du Conseil? Il y a tout d’abord une question morale. Le PE avait fait le choix d’un niveau de rémunération très élevé, une solution qui s’avérait extrêmement généreuse pour quelques pays (dans quelques Etats le député aurait touché plus que le premier ministre), surtout chez les nouveaux entrants. On imagine les convoitises qu’auraient entraîné ces salaires mirobolants, parfois vingt à trente fois supérieur au salaire moyen du pays. Le niveau proposé a été certainement une maladresse.

Mais on ne peut exclure une autre raison, purement budgétaire. Sur la base de la proposition du PE, le salaire annuel de 732 députés représenterait de l'ordre de 75 millions d'euros. La France et l'Allemagne qui sont les deux principaux contributeurs du budget communautaire auraient financé 40 % de la dépense, soit 30 millions. Alors qu’au même moment les deux pays se font tancés par le PE pour ne pas avoir respecté le pacte de stabilité…

Se faire critiquer soit, mais, en plus, payer pour se faire en..., c’était tout de même un peu trop demander.


Mots clés : salaire, indemnité, rémunération, écart de salaire, député européen, eurodéputé, parlementaire européen, Parlement européen.
Source : non publié
Date : 11/04/04

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A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.