FINANCES DE L'EUROPE - Tout savoir sur le budget de l'Europe

Négociation budgétaire: qui a raison? la presse ou le prof

Paris sur la négociation budgétaire européenne: le match presse contre profs
 
 
La négociation budgétaire en cours - les 7 et 8 février - est cruciale car elle va déterminer le cadre financier applicable à l’Union européenne mais elle est aussi intéressante sur un strict plan professionnel  et pourrait même servir de cas d’étude à Sc. Po ou dans les écoles de journalisme.
 
Voilà plusieurs mois que j’écris sur ce sujet dans plusieurs médias et que je conclue que l’accord sera conclu. Les médias parlent au contraire de blocages sévères et évoquent la menace d’un échec des négociations. Mon éditeur favori – la fondation Schuman- qui a publié un des mes travaux techniques sur ce sujet (négociation budgétaire européenne, la fin d’un (petit) suspense in Questions d’Europe n° 266)- a même exprimé quelques inquiétudes. Nous jouons l’un et l’autre notre crédibilité. Alors, qui a raison ? Le prof- en l’espèce moi, même si je ne suis qu’enseignant vacataire dans une université prestigieuse-, qui dit oui, ou la presse, qui dit non ?
 
Comment expliquer cette différence, voire cette opposition sur un même sujet ?
 
Les journalistes sont des généralistes. Ils vont traiter de ce sujet aujourd’hui, ils en traiteront un autre demain. On ne leur demande pas d’être des experts mais de savoir expliquer et commenter, communiquer. Et trouver l’information. Pour cela, ils interrogent, enquêtent. Ils se déplacent, entrent en contact avec les acteurs de la pièce en cours, les négociateurs et leur entourage, leurs chargés de communication ou leur cabinet. Ils sont sensibles aux ambiances, et plus encore, aux confidences. Ils se copient aussi beaucoup et partent souvent des dépêches d’agences de presse. Une erreur est répétée et amplifiée. Internet est une formidable caisse de résonnance. Le journalise écoute et rend compte.
 
Le prof a une toute autre méthode de travail. Il étudie le passé. Sans être participant, il a une expérience. En l’espèce, la négociation en cours est le cinquième exercice du genre et le deuxième cadre financier négocié à 25/27. Ses contacts ne sont pas les négociateurs au grand jour, mais les hommes de l’ombre, les chefs de bureau, ceux qui préparent les notes dans des bureaux sans fenêtre. Le prof travaille sur documents, analyse, décrypte les détails. En 2005, par exemple, lors de la négociation du cadre financier 2007/2013, le budget agricole n’a pas été débattu au Conseil européen. L’enveloppe avait été fixée en 2002, lors de l’adhésion des nouveaux Etats membres. Les Etats anti PAC, furieux de s’être faits ainsi floués, s’étaient en quelque sorte vengés : le budget de la PAC figure désormais dans une rubrique générale «conservation et gestion des ressources naturelles ». Le mot agriculture a disparu...
 
Lorsque le journaliste écoute et rend compte, le prof lit et analyse. L’un privilégie le téléphone et l’autre, la bibliothèque. L’un travaille sur l’écume, l’autre, sur l’onde de la vague. Le journaliste est plus accessible mais prend le risque de se précipiter, le prof a un côté sérieux mais est souvent décalé et inaccessible. Le journaliste spécialisé tente de concilier les deux métiers mais est-il assez spécialisé? Le prof tente de communiquer mais son message est souvent troublé par le souci du détail.
 
Deux approches, deux fonctions. L’une ne vaut pas mieux que l’autre. Elles se complètent. Mais parfois s’opposent. Le match du jour a lieu en deux temps. Première mi temps, jeudi 7 février. Avantage presse- blocages assurés-. Deuxième mi temps, vendredi 8 février. Retournement de situation, accord au sommet et ... victoire du prof. Voilà mon pari. En l’espèce, l’analyse montre qu’il y a toujours eu un accord et que le résultat final est très proche de la demande des contributeurs nets.
C’est votre dernier mot ? C’est mon dernier mot Jean-Pierre.
Jean-Pierre ? Où êtes-vous ? Cela ne vous intéresse pas ?


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Date : 08/02/2013

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A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.