FINANCES DE L'EUROPE - Tout savoir sur le budget de l'Europe

Cinquante ans de budget communautaire

Le budget est sans doute encore modeste, puisqu’il ne dépasse pas 1% du PNB européen mais il se compare au budget moyen d’un Etat membre et les plus gros contributeurs - l‘Allemagne, la France et le Royaume uni, qui financent la moitié des dépenses- le trouvent à son bon niveau, ce qui ne doit pas être négligé. D’ailleurs, la contribution par habitant n’a cessé d’augmenter : l’équivalent de 100 € par habitant (en euros actualisés) à la fin des années 70, 200 € au début des années 90, 235 € par habitant aujourd’hui.

 

            La structure des dépenses a été bouleversée, le budget a été longtemps écrasé par la seule politique agricole commune (PAC) mais le « colosse budgétaire », comme on l’appelait autrefois, a été vaincu. Les dépenses dites structurelles ont pris le relais et sont désormais à quasi égalité avec les dépenses agricoles. Les deux postes représentent 80 % des dépenses totales. Le budget a aussi fait face à cinq élargissements, chacun ayant laissé son emprunte: les corrections financières après l’adhésion du Royaume uni en 1973, la poussée des aides régionales dans le sillagde l’élargissement de 1986, la dimension environnementales après 1995 et la priorité à la cohésion après 2004. Mais ce sont surtout les réformes adoptées en 1988/1992 qui ont mis fin aux crises budgétaires récurrentes qui empoisonnaient la construction européenne. En 1988, une nouvelle contribution assise sur le PNB national a garanti le financement du budget et l’introduction d’un cadre financier pluriannuel fixant des plafonds de dépenses annuelles a apporté la paix budgétaire pour cinq ou sept ans. L’appui aux agriculteurs, autre sujet de discorde, a été radicalement modifié en 1992 et 2003, quand les soutiens par les prix et les garanties d’écoulement des produits ont été remplacés par des aides directes aux revenus des producteurs. Le budget n’a cessé d’évoluer même si les orientations jugées plus dynamiques comme les dépenses de recherche peinent encore à s’imposer.

 

            En second lieu, le budget communautaire a été un outil d’intégration. Le budget fédère et conduit la Suède par exemple, à s’intéresser à l’huile d’olive. Initialement entre les mains du seul Conseil, c’est à dire les ministres des Etats membres, le budget est devenu un acte collectif, au carrefour de toutes les légitimités, celle des Etats et celle des peuples. Il fait intervenir toutes les institutions et utilise toutes les procédures: la Commission, le Parlement européen qui vote le budget avec le Conseil depuis 1975, et le Conseil européen chargé de déterminer le cadre financier pluriannuel. Le budget a été également défricheur. Il a été le premier acte dont l’adoption par le Conseil est passée de l’unanimité à la majorité qualifiée -même si le cadre financier reste décidé à l’unanimité-, et l’écu, l’unité de compte utilisée pour le budget, a ouvert la voie à l’euro. Ainsi, en mêlant avancées symboliques (l’embryon d’un impôt européen) et freins sur d’autres secteurs, le budget est une illustration de la construction européenne, chaotique mais finalement assez audacieuse.

 

            Enfin, le budget communautaire s’est avéré un formidable outil de solidarité. Depuis 1988, les subventions des fonds structurels sont le principal outil au service du développement économique des régions les moins prospères ou en difficultés: près de 800 milliards€ (en euros actualisés) auront été affectés à cette fin entre 1989 et 2013. Mais le budget est aussi un instrument de redistribution par le biais des « soldes nets » calculés par différences entre les contributions au budget et les paiements dans les Etats.

 
            Mais la lucidité oblige à reconnaître aussi que tous les Etats veillent avec attention à leur position vis à vis du budget de l’UE. Incontestablement, la situation est très contrastée entre Etats membres. Bien que les aides ne suffisent pas à garantir la croissance économique d’un pays, les 35 milliards et 100 milliards€ -en € actualisés- reçus du budget communautaire par l’Irlande et l’Espagne depuis leur adhésion en 1973 et 1986, ont été et restent de puissants vecteurs d’attraction pour les nouveaux adhérents. Les bénéficiaires veillent à le rester et les contributeurs tendent à réduire leur contribution. Mais ce n’est pas à l’Allemagne, responsable de la commémoration, que l’on pourrait faire des reproches. Depuis 1957, sa contribution nette au budget communautaire, se monte à 250 milliardsd’euros.


Mots clés : budget communautaire
Source : Le Monde
Date : 27/03/2007

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A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.