FINANCES DE L'EUROPE - Tout savoir sur le budget de l'Europe

La cour des comptes et les fonds communautaires

L’impulsion décisive fut donnée par M. André Chandernagor, premier président en 1983 après avoir été ministre chargé des affaires européennes, une innovation du gouvernement Mauroy en 1981. La compétence de la Haute juridiction a été également confortée par les textes européens et nationaux. Les enjeux proprement financiers ont aussi augmenté puisque la Commission européenne sanctionne l’insuffisance des contrôles nationaux par des corrections et des refus d’apurement des comptes qui se traduisent par des remboursements non négligeables. La France a ainsi reversé 246 M€ au budget de l’Union en 2006. Autant d’éléments pour justifier, si besoin, l’intérêt de la Cour aux fonds européens. 

La Cour a commençé son investigation au milieu des années 80 par une critique du financement du budget communautaire, considérant que les ressources propres du budget européen n’avaient pas à figurer dans le budget national. Ce qui suscita une vive réplique du ministre du budget de l’époque, Michel Charasse : « que le Sénat se rassure, je n’ai pas l’intention de suivre la suggestion de la Cour ». Le statut du financement a été clarifié définitivement en 2001 par la nouvelle loi relative aux lois de finances qui donne une base légale au prélèvement sur recettes au profit du budget communautaire (18,7 Mds € en 2007). 

Concernant les dépenses, la première insertion sur les fonds européens dans le rapport public annuel de la Cour date de 1992. Elle concernait l’application de la politique agricole commune (PAC) en France. 30 ans après les premiers versements européens, la Cour n’avait pas manifesté un empressement caractérisé pour suivre ces dépenses, mais quand elle le fit, son constat fut sévère voire accablant. La PAC fut d’ailleurs radicalement réformée cette année là, mettant un terme au système d’aides à la production et à l’écoulement des stocks, incohérent et très coûteux pour le budget communautaire. La deuxième insertion remonte à 1999, avec pour la première fois, un chapitre entier dédié aux crédits européens, aux aides agricoles et structurelles. 1992, traité de Maastricht, 1999, mise en place de l’euro, on a peine à croire que les publications de la Cour ne soient que des hasards d’édition. Depuis 2002, les insertions européennes dans le rapport public sont moins régulières. 

Qu’attendre des rapports de la Cour ? D’abord, on lui doit quelques unes des meilleures synthèses jamais écrites sur le budget communautaire, comme en 1992, lorsqu’elle écrit « la PAC ouvre des droits tandis que les autres politiques n’offrent que des facultés de financement ». Même si la fin de la PAC est proche, il est certain qu’aucune politique ne sera jamais aussi aboutie. La Cour est aussi une force de proposition. Hélas, du fait des délais de procédure, les rapports arrivent parfois trop tard et quelques critiques portent sur des régimes d’aides en voie d’extinction. Mais quelques suggestions ont été écoutées comme ce fut le cas pour la fusion, en cours, des offices agricoles. Enfin, la Cour a osé poser quelques questions (im)pertinentes sur la légitimité même des interventions de l’Union. Quel peut être l’impact de subventions européennes en matière d’insertion quand elles sont noyées dans un effort public trente fois plus important? Ou bien encore « quand tous les Etats peinent à appliquer la réglementation européenne, n’est –ce pas la réglementation qui est en cause ? ».


Mots clés : fonds communautaires
Source : Le Monde
Date : 27/02/2007

Rubriques

Recherche


S'abonner & partager

A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.