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Comment financer l'Union pour la Méditerranée ?

Comment financer l’Union pour la Méditerranée ?
 
L’Union pour la Méditerranée (UPM), combien ça coute et qui paye ? Puisqu‘il est acquis que l’Union sera créée le 13 juillet prochain, ses 43 membres possibles doivent maintenant se poser la question du coût et du financement du nouveau grand projet géopolitique euro-méditerranéen.
 
Que faire ? Les projets envisagés concernent principalement l’énergie (champs de capteurs solaire par exemple), l’environnement (traitement des eaux usées...), les infrastructures (réseaux d’énergie ou de transport...), la recherche et l’enseignement (échanges universitaires...). L’UPM offrira une sorte de panoplie de projets financés au coup par coup sur un principe simple: vient qui veut pour bénéficier ou soutenir les projets qu’il veut... Si la liste est consensuelle, la hiérarchie des priorités n’est pas encore définie. Deux options sont ouvertes: faire de l’UPM un instrument de convergence, un outil de développement sur le modèle de la politique structurelle européenne qui a si bien réussie aux pays qui ont rejoint l’Union européenne, ou profiter de l’impulsion de l’UPM pour financer des biens publics utiles à long terme mais sans rentabilité immédiate. Globalement, le sud pencherait plutôt pour la première voie, privilégiant les infrastructures, tandis que l’UE, consciente d’une sorte d’urgence écologique, favoriserait plutôt les dépenses de dépollution d’une mer martyrisée.
 
Dans ce contexte, personne n’ose avancer de chiffre. Néanmoins, quelle que soit l’option suivie, il existe une sorte de consensus sur un seuil de crédibilité autour de 25 milliards d’euros sur cinq ans, soit 5 milliards par an. Une somme finalement assez voisine des 4 milliards actuellement accordés aux pays du sud de la Méditerranée, par le biais, à parts égales, du budget communautaire, de l’aide bilatérale, et de l’intervention de la Banque européenne d’investissement (BEI).
 
Comment financer ? Cinq voies sont possibles. L’important sera de trouver « le bon mix ».
 
Les subventions du budget communautaire. C’est la voie qui se présente spontanément. Toutefois, l’Allemagne a fixé les bornes : l’UPM, bénéficiera, ni plus ni moins, des crédits actuellement programmés dans le cadre du processus de Barcelone et de la politique de voisinage européenne soit 7,5 milliards d’euros sur la période 2007/2013.
 
L’aide bilatérale. La moitié de l’aide budgétaire européenne aux pays du sud méditerranéen vient de l’aide bilatérale. La France est le premier bailleur de fonds avec 700 millions d’euros par an. Certes, l’engagement des pays européens d’augmenter leur aide au développement pourrait dégager des sommes susceptibles d’être utilisées pour l’UPM mais cette réorientation ne se fera pas sans réticences. L’expérience montre que toute initiative régionale bénéficie avant tout au pays le mieux placé dans la zone. De là à imaginer qu’un Erasmus méditerranéen permettrait surtout de financer les quelques 75.000 étudiants du Maghreb et du Moyen Orient que la France accueille...
 
Les financements bancaires institutionnels européens. M. Philippe de Fontaine-Vive ,vice président de la BEI qui a déjà une longue expérience de financement – prêts et participations- dans cette région, voit dans le projet d’UPM une occasion de donner un cadre politique à ses d’investissements, « de faire lever ce que la BEI a semé »,  et de corriger « le développement insoutenable du tourisme» dans une optique de développement durable. La banque a d’ailleurs pris une longueur d’avance en établissant une liste de 44 projets prioritaires de dépollution pour un coût de 2,1 milliards d’euros.
 
Outre ces trois canaux publics, le financement privé est la seule solution pérenne. L’appui du financement arabe serait incontestablement un signal politique fort pour la future Union. Or, si les banques européennes peuvent se montrer frileuses dans le contexte bancaire actuel, les banques arabes ont pour caractéristique d’être en situation de surliquidité, c'est-à-dire d’avoir des engagements à court terme, sous forme de placements monétaires, supérieurs aux dépôts, ce qui les rend par conséquent moins vulnérables aux risques que la plupart des banques européennes. La période offre des possibilités de coopération.
 
Reste l’idée « tellement française » de la fiscalité. Taxe sur les accostages dans les ports, sur les hydrocarbures transportés, sur les touristes, sur les croisiéristes,... la Méditerranée est un boulevard pour l’imagination fiscale. Cette piste est, bien sûr, dénoncée par tout le monde. En son temps, la « taxe Chirac » sur les billets d’avion avait été, elle aussi, accueillie avec beaucoup de scepticisme, avant de s’imposer peu à peu. A défaut de fiscalité, une « contribution volontaire » serait un premier pas plus acceptable. Une taxe de 0,5 euro par nuité touristique et de 1 centime par litre d’essence transporté rapporterait 5 milliards d’euros.
 


Mots clés : Union pour la Méditerran&ée, Aide publique au développement, Erasmus méditerranéen, taxe environnementale
Source : Le Monde 20 05 2008
Date : 19/05/2008

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A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.