FINANCES DE L'EUROPE - Tout savoir sur le budget de l'Europe

Quel budget pour l’Union méditerranéenne ?

         Il est tout d’abord nécessaire de distinguer le budget d’une hypothétique UMED des actuels instruments financiers destinés aux pays du sud de la Méditerranée. Tant le programme de partenariat euro-méditerranéen MEDA entre 1995 et 2006 que l’instrument de voisinage et de partenariat (IEVP) depuis 2007, dont 60 % est dirigé vers le Sud, sont des aides nord-sud traditionnelles. L’enveloppe décidée lors de sommets internationaux reste tributaire de ce que veulent bien consentir les pays de l’UE. Avec 1 milliard d’euros par an au titre de l’IEVP, 570 millions d’aides de pré-adhésion à la Turquie ainsi que quelques crédits spécifiques (Palestine, Irak…), les pays du sud reçoivent de l’ordre de 2 milliards d’euros par an de crédits communautaires.

 

            Maisl’UMED ne peut pas être un super MEDA car le concept est radicalement différent. Il ne s’agirait plus d’un simple partenariat mais d’arbitrer collectivement, selon des règles à définir (avec quelle majorité, quelle pondération pour chacun des 40 membres…) des politiques à conduire en commun.

 

            Lesquelles? Ce ne peut être la PAC, à bout de souffle. Les politiques novatrices répondant à la stratégie de Lisbonne paraissent elles aussi inadaptées dans la mesure où, même si les coopérations avec le sud étaient encouragées, l’essentiel serait capté par les pays du nord. En revanche, deux voies sont envisageables. La politique de cohésion par le biais des fonds structurels serait évidemment sollicitée pour des pays dont le revenu par habitant peut être de vingt fois inférieur la moyenne communautaire car le développement du Sud est évidemment prioritaire pour tous. Sur la base de l’aide moyenne accordée à la Roumanie, pays le plus pauvre de l’UE actuelle, soit 34 euros par an et habitant, l’assistance aux pays du sud de la Méditerranée représenterait une dépense annuelle de 9 milliards d’euros

 

            Mais aussi utile ou nécessaire qu’elle soit, une politique régionale de développement ne constitue pas une politique commune au fondement même du concept d’UMED. C’est donc vers une autre voie qu’il faudrait chercher.

 

            Une politique commune de l’environnement serait appropriée. La Méditerranée est une mer martyrisée, une immense décharge dans laquelle fermentent tous les conflits du futur. Avec 300 millions de tonnes de déchets sur les fonds marins, 60 % des eaux usées dévervées sans aucun traitement, 60.000 tonnes de pétrole rejetées chaque année par les déballastages des pétroliers, des pénuries d’eau aggravées par le tourisme de masse…, la plupart des indicateurs environnementaux sont terrifiants, conséquence d’années d’insouciance et d’immunité. L’imbroglio réglementaire et le foisonnement d’initiatives institutionnelles consacrées à la protection de l’environnement dans la région sont autant révélateurs d’une prise de conscience que d’une impuissance à maîtriser la situation. Les principaux enjeux portent sur le traitement de l’eau et des déchets. Selon une première estimation grossière, équiper les 600 villes du rivage de stations d’épuration représente un coût de l’ordre de 18 milliards d’euros soit un coût annuel de fonctionnement de 3 milliards. Fournir de l’eau aux 100 millions de personnes en pénurie coûterait de 17 milliards. Traiter les déchets ménagers dans le bassin méditerranéen représenterait un coût annuel de l’ordre de 10 milliards. Au total, la dépense annuelle pour stopper la dégradation environnementale serait de l’ordre de 30 milliards d’euros.

 

Comment financer ce montant ? L’UMED pourrait innover en établissant un impôt de solidarité. Une taxe de 1 Euro par nuitée touristique en Méditerranée et de 4 euros par baril de pétrole transporté en Méditerranée financerait la moitié de la dépense. Le premier impôt de sauvetage humanitaire en quelque sorte.

 


Mots clés : Union méditerranéenne
Source : Le Monde
Date : 03/07/2007

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A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.