FINANCES DE L'EUROPE - Tout savoir sur le budget de l'Europe

Les aides européennes en faveur de l'égalité hommes-femmes.

Les aides européennes en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes


Le constat est connu. Les femmes restent plus touchées par le chômage et moins payées que les hommes. Les métiers se sont féminisés, mais les femmes continuent d’y occuper des positions inférieures à celle des hommes. Quelques promotions récentes montrent que la marginalisation des femmes dans la vie politique s’estompe, mais la règle générale de l’inégalité prévaut au moins au sein du Parlement.

Le principe d’égalité entre les hommes et les femmes fait partie des fondements de la Communauté. Limité à la seule égalité des rémunérations dans le traité de Rome (art. 119), il a été élargi à l’égalité de traitement et l’égalité des chances par le traité d’Amsterdam en 1995 (art. 141). Il a été régulièrement réaffirmé tant par de nombreuses directives que par une jurisprudence constante de la Cour de justice européenne. Le sujet est sensible et les sanctions sont lourdes. La Commission a d’ailleurs demandé à la Cour de condamner la France à une astreinte de 142.425 euros par jour (934.000 francs) pour avoir conservé une législation spécifique interdisant le travail de nuit des femmes dans l’industrie. Législation protectrice, mais discriminante. Les femmes ne veulent pas être « protégées », elles veulent le respect et l’égalité. Ce n’est certainement pas un hasard si le premier discours officiel de Mme Anna Diamantopoulou, commissaire européen chargé de l’emploi, moins d’une semaine après sa nomination, fut consacré à ce thème.

L’action budgétaire de l’Union ne peut être que marginale dans ce contexte politique, culturel. Marginale et, hélas, particulièrement complexe. On distingue trois relais budgétaires. Il existe tout d’abord un « programme d’action communautaire » pluriannuel qui donne d’une certaine façon le cadre de référence politique. 2000 marque la fin du 4° programme quinquénal débuté en 1996. Il comporte un petit volet financier (30 millions d’écus sur cinq ans pour quinze Etats membres), destiné à la réalisation d’études, l’échange et la diffusion d’expériences par des publications etc...

Le second levier, beaucoup plus important, est celui de l’initiative communautaire (IC). Il ne faut pas confondre programme communautaire et initiative communautaire. Le programme est décidé par le Conseil et géré par la Commission sur les crédits des « politiques internes », tandis que l’ initiative est décidée par la Commission et gérée par les Etats membres sur les crédits des fonds structurels, en l’espèce le Fonds Social Européen. Jusqu’en 1999, les femmes avaient « leur » initiative communautaire, dite « NOW » - New Opportunities for Women-, qui constituait le volet « femmes » de l’IC « Emploi ». NOW vise à promouvoir l’égalité des chances en faveur des femmes sur le marché du travail par des mesures de formation et d’accès à l’emploi. Les projets soutenus doivent être innovants et avoir une dimension transnationale. Une fois l’initiative communautaire adoptée, les appels d’offres dits « appels à projets » sont lancés par les Etats membres. Les projets sont cofinancés par l’Union et un ou plusieurs Etats membres. Les financements communautaires ont représenté 500 millions d’écus (3,3 milliards de francs) sur la durée de l’initiative Emploi-Now, entre 1994 et 1999. 10 % ont été affectés à la France.

La réforme des fonds structurels supprime à partir de 2000 cette approche par « groupe-cible » (les jeunes, les handicapés, les femmes..) au profit du « mainstreaming » qui consiste à généraliser la prise en compte de l’égalité hommes femmes dans toutes les politiques. En d’autres termes, il n’y aura plus une action spécifique pour les femmes mais l’égalité hommes - femmes sera prise en compte dans tous les actions de la Communauté. La future IC « Equal » qui succèdera à l’ancienne IC Emploi est en cours de bouclage.

Le dernier relais vient des « initiatives pilotes » qui sont des crédits des fonds structurels (comme les IC), mais gérés par la Commission (comme le programme d’action). Les appels d’offres sont ici communautaires. L’enveloppe budgétaire est moindre (50 millions d’écus sur six ans), les projets sont moins importants, mais les taux de cofinancement européen sont supérieurs aux IC. Le caractère innovant est déterminant pour la sélection d’un projet pilote. Dans la majorité des cas, le projet doit également être transnational.

Ce type d’action se heurte à trois difficultés pratiques. Tout d’abord, on l’aura compris, la complexité de l’organisation. Appels d’offres national ou européen, contreparties nationales ou pluri nationales, taux de cofinancement variables selon les cas..., difficile, même à la Commission, de s’y retrouver. Une multiplicité de « guichets » d’autant moins justifiée qu’elle est plus liée aux cloisonnements entre services et aux modes d’imputation budgétaire qu’aux spécificités des actions financées. Il existe incontestablement une marge d’amélioration sur ce point. Ensuite la plupart des actions doivent avoir un volet transnational. Ce qui implique des contacts et surtout une harmonisation des approches et des procédures entre les partenaires européens. Cette condition n’est pas la plus simple à respecter. Loin s’en faut. Enfin, la gestion financière est délicate. Après une première avance des fonds européens, qui donne une aisance trompeuse, les paiements communautaires sont versés au vu de l’avancement de l’ensemble des projets dans l’Etat membre. Il existe donc une solidarité de fait entre les porteurs de projets de telle sorte que le retard de l’un se répercute sur les paiements des autres.

Autant dire que les programmes européens ne sont pas faits pour les petites structures, associations, entreprises ou collectivités. Mais celles qui osent braver ces difficultés, se doter d’équipes adaptées, s’assurer de garanties financières, et se lancer dans l’aventure européenne, s’en sortent plutôt bien. Le centre national d’information et de documentation des femmes et des familles (CNIDFF) a ainsi pu développer quatre programmes de formation (trois projets retenus dans le cadre de NOW et une initiative pilote) représentant plus de 10 millions de francs sur trois ans de crédits européens, soit entre 10 et 20 % du budget du centre selon les années. La directrice du centre estime que le financement communautaire est « très mobilisateur et un excellent déclencheur d’initiatives ».


Mots clés : égalité hommes femmes, programme communautaire, initiative communautaire, initiative pilote, NOW, mainstreaming, partenariats européens,
Source : Le Monde
Date : 11/01/2000

Rubriques

Recherche


S'abonner & partager

A propos

Nicolas Jean-BrehonParce que la construction européenne a un immense besoin de pédagogie, que celle ci est aujourd'hui mal assurée, et que chacun conviendra que toutes les initiatives pour y remédier sont bienvenues;
- Parce que les formations européennes notamment en finances publiques sont rares, et que l'information officielle est souvent complexe ou partiale;
- Parce que 20 ans d'expérience sur ces questions, en tant que haut fonctionnaire parlementaire, puis en tant qu'enseignant en finances publiques et chroniqueur budgétaire au Monde de l'économie, me conduisent à penser que l'opinion publique s'éveille et commence à s'intéresser à ces sujets;
- Parce que les ouvrages et articles dans ce domaine sont rares et qu'il m'a paru intéressant de regrouper les informations éparses.